Un bon ami joueur a été 2199 Elo mais n'a jamais franchi les 2200, à son grand désespoir. En 2009 j'étais classé 2295, mon meilleur classement, lorsque lors d'un week-end d'interclubs j'ai eu la chance de me voir proposer avec les Noirs le minime Maxime Lagarde, alors 2345, aujourd'hui Grand Maître à 2526, qui ne m'a laissé aucune chance. Le lendemain je réalisais une lourde contre-perf en perdant contre un joueur à 2022. Un petit week-end à -20 points, et la barre des 2300 Elo s'éloigna fortement.
Le souci avec la plupart des entraîneurs, c'est qu'ils ne jouent pas très souvent. Pour moi moins d'une trentaine de parties par an depuis 2006. Cela engendre un manque de rythme. Généralement dès qu'on commence à le retrouver, le tournoi est déjà fini et le prochain aura lieu dans 6 mois... Pas une excuse ultime pour mal jouer, mais en tout cas pas évident pour enchaîner et progresser.
La semaine dernière j'ai joué le tournoi de Vaujany dans les Alpes. Le calendrier (une ronde par jour) aussi bien que la cadence ([1h40/40c + 0h50/20c + 0h10] le tout avec +30 sec/c) sont pour moi ce qu'on peut trouver de mieux si on veut vraiment jouer aux échecs. L'absence de double ronde est un confort pour le joueur (surtout le vieux joueur...). Et la cadence permet de ne pas trop saboter la finale ou la fin de la partie.
Crédité d'un classement de 2288 en m'y rendant, j'avais quelques espoirs de me rapprocher, voire de dépasser, cette stupide/maudite/fichue barre de 2300. Pourtant après avoir manqué la nulle après 6 heures de jeu contre un GM lors de la ronde 4, et surtout m'être emmêlé les pinceaux ronde 5 contre un 2100 dans une finale très intéressante D+3p contre TFC, débouchant sur une défaite, je pouvais penser que je devais faire une croix sur mon objectif. Après une perte de 11 points, le plus probable était effectivement de ne pas l'atteindre. Mais il se passe parfois des choses inattendues aux échecs !
Ronde 6 : mon jeune adversaire italien réagit mal dès le 6ème coup et se retrouve rapidement en difficulté. La partie se conclura en 20 coups, grâce au thème du 2ème diagramme.
Ronde 7 : mon adversaire est d'humeur très agressive et sacrifie un Cavalier dès le 13ème coup. C'est trop optimiste et je gagne sans trop de frayeurs malgré une réflexion empruntée.
Ronde 8 : on me propose un cadet hongrois 2275 qui joue pour une norme de MI. Il me cuisine plutôt bien et je suis près du précipice de la défaite (3ème diagramme) avant de m'en sortir à moitié par miracle puis de saisir ma chance après le contrôle de temps.
Ronde 9 : j'ai les Blancs contre un Maître à 2450. J'obtiens un petit avantage mais sous-estime légèrement ma position en pensant que c'est égal. J'ai un zeitnot délicat à gérer, et il manœuvre en tous sens pour me faire craquer. Mais pour ce qui concerne les longues manœuvres dans les positions fermées j'ai été formé sur le tas à l'école lettonne (merci Anda !) et ne suis donc pas très facile à déborder. Ce faisant j'ai aussi appris que le soit-disant torturé avait également le droit de jouer pour le gain. Lorsqu'il a commis une imprécision au 48ème coup je ne dirais pas que j'ai sauté sur l'occasion mais presque. Cela s'est terminé dans la position du 4ème diagramme.
La somme de tout cela équivaut à un nombre de points gagnés qui me fait dépasser in-extremis 2300. Cela me permet d'obtenir le titre de Maître FIDE (MF). Il est certain que cela avait déjà plus de valeur lorsqu'il fallait maintenir ce classement durant 30 ou 50 parties. J'ai toujours considéré ce titre comme anecdotique, contrairement aux titres de MI et GMI, et le fait de l'obtenir n'y change rien. Par contre dans un monde où l'image est importante et où il faut savoir se mettre en valeur, et cela vaut aussi pour un entraîneur d'échecs, cela compte. En pratique cela permet aussi d'obtenir de temps en temps une réduction sur le tarif de l'inscription, et d'être considéré officiellement comme un joueur titré pour les tournois fermés et les normes de MI et GMI. Enfin c'est tout de même une récompense d'un certain investissement échiquéen.
Voici quatre Faites-vous la main, pas très difficiles, issus de mon tournoi.
Ronde 1
Les Noirs viennent de jouer Cb5. Ils espèrent poursuivre avec cxd6 puis Cc3.
Quelle surprise les attendait ?
Ronde 6
Les Noirs espèrent roquer mais n'en auront pas le temps.
Les Blancs jouent et gagnent.
Ronde 8
Les Blancs viennent de prendre en f6. Ceci attaque la Tour,
et menace aussi et surtout Cxf5 (ou Txf5) suivi de Dh6 avec mat imparable.
Comment les Noirs survivent-ils ?
Ronde 9
Les Noirs viennent de jouer b5 mais le contre-jeu arrive trop tard.
Les Blancs jouent et gagnent.
Réponses (sélectionnez le texte invisible ci-dessous) :
Ronde 1 : 1.Dxg7+! Rxg7 2.Txc7+ Cxc7 3.Txc7+ Dxc7 4.dxc7 et il n'y a rien à faire contre d6-d7.
Ronde 6 : 1.Fa7! Dd8 2.Cb7 gagne la Dame. Le thème du mat du couloir avec le Roi au centre.
Ronde 8 : 1...Txd4 (le seul coup) 2.fxe7 (sur 2.Txf5 les Noirs s'en sortent grâce à 2...exf5 et le thème du mat du couloir les sauve ! 3.fxe7 Dxe7-/+) 2...Dxe7 et avec un pion pour la qualité et des pièces bien placées, ce sont même les Noirs qui purent jouer pour le gain.
Ronde 9 : 1.Cf5+! l'arrivée d'une 3ème pièce à l'attaque est fatale au Roi noir qui ne peut pas compter sur l'aide du Ca8 et de la Tc5. 1...gxf5 (1...Rf6 2.Th8 Df7 3.Dh6 et le mat suivra après Tf8) 2.Dh5 (2.gxf5 gagne aussi) et les Noirs n'ont aucun moyen de se défendre efficacement contre 3.Tg6+ ou 3.Dxg5+. Ils abandonnèrent peu après.